ÉSPÉ : hall de gare ou lieu de formation ?
Par FSU-Univ-Grenoble le mardi 10 juin 2014, 17:33 - Archives - Lien permanent
La massification attendue des enseignants en temps partagé à l'ÉSPÉ de Grenoble va-t-elle transformer cette école en un simple lieu de passage, pour les étudiants comme pour leurs formateurs ?
Le 19 mai dernier, les élus des personnels en poste ou rattachés à l'École supérieure du professorat et de l'éducation (ÉSPÉ) de Grenoble ont alerté le conseil d'école à propos des décisions communiquées une semaine auparavant aux personnels du premier ou second degré actuellement détachés à mi-temps ou à temps-plein à l’ÉSPÉ par le directeur des ressources humaines du rectorat.
En effet, le rectorat a édicté les nouveaux principes d’organisation du service de ces formateurs, les objectifs visés par cette nouvelle organisation et les modalités transitoires les concernant. Désormais, les enseignants en temps partagé seraient recrutés à mi-temps, pour une durée de cinq ans maximum. De plus, de façon transitoire, ces nouveaux principes d’organisation s’appliqueraient de façon rétroactive aux enseignants actuellement détachés, et ce, dès la rentrée 2015.
Les élus ont souhaité souligner trois points.
- Tout d’abord, l’application rétroactive de ces règles pose problème. En effet, il semble indispensable de prendre en compte les efforts considérables que les formateurs actuellement détachés ou affectés en temps partagé ont consentis, dans un contexte mouvant, sans spécification claire de leurs missions, et sans certitude sur les conditions de leur renouvellement. En d’autres termes, l’institution a laissé ces collègues s’investir très intensivement, puis elle met brutalement fin à leur mission. Les élus estiment donc que les collègues sont malmenés professionnellement par cette situation et s'interrogent avec inquiétude sur l’évolution de leurs missions.
- De plus, cette application rétroactive constitue une menace pour le bon fonctionnement de l’ÉSPÉ du fait de la perte massive de compétences qu’elle va entraîner à l’issue de l’année à venir.
Les élus demandent donc à ce que cette mesure n’ait pas d’effet rétroactif et que les collègues actuellement à temps-plein puissent le rester pendant deux années au moins (années à l’issue desquelles ils pourront au choix continuer trois ans à mi-temps ou réintégrer une classe à temps-plein). Cette durée de deux années semble un minimum pour leur permettre de réfléchir sereinement à leur avenir professionnel et d’engager d’éventuelles dispositions de reconversion.
- Enfin, les élus prennent acte du principe d’un engagement de ces personnels sur une durée déterminée. Cependant ils ne peuvent que relayer une inquiétude certaine quant à l’impact des modalités d’organisation prévues sur la qualité de la formation à venir et sur le fonctionnement des équipes plurielles. Dans ce contexte, ces formateurs vont-ils être cantonnés à des missions mineures ? D'après les expériences passées, un investissement personnel conséquent, sur plusieurs années, est nécessaire pour qu’un formateur soit en mesure de participer efficacement à des actions de formation d’enseignants. La construction de relations de coopération efficaces avec les différents partenaires (universités, rectorat, tuteurs en établissement) exige, elle aussi, du temps et de la stabilité. Ainsi, les formateurs en temps partagé commenceront à peine à avoir les compétences, les repères et les contacts nécessaires pour participer sereinement au travail des équipes plurielles... au terme de leur contrat de cinq ans.
Les élus demandent donc que les modalités d’organisation soient assouplies et ils proposent qu’elles puissent s’adapter aux besoins des équipes de l’ÉSPÉ ainsi qu’aux vœux des personnels appelés à intervenir dans la formation des enseignants. Ce « turn-over » permanent pose également fortement la question de l’accueil et de la formation de ces collègues. Par qui, comment, avec quelle reconnaissance ceux-ci seront-ils pris en charge au sein de l’ÉSPÉ ? Quid de ces collègues qui se retrouveront seuls et éloignés sur les sites distants ?
En l’état, un tel projet semble soulever plus de questions qu’il n'apporte de réponses, et on peine à comprendre la volonté affichée de le mettre en œuvre si hâtivement. Les élus au conseil d'école de l'ÉSPÉ espèrent donc que la réflexion sur la construction des équipes plurielles pourra se poursuivre de façon concertée.
Depuis cette adresse au conseil d'école de l'ÉSPÉ, une nouvelle rencontre avec le DRH du rectorat a eu lieu le mercredi 4 juin. Un délai d'une année supplémentaire a été accordé aux collègues en temps partagé, ainsi qu'un contrat de 5 ans renouvelable. Certes cette décision apaise certaines inquiétudes. Elle ne remet cependant pas en cause le principe délétère de la présence massive parmi les enseignants de l'ÉSPÉ de collègues devant partager leur temps entre école, collège ou lycée, et ÉSPÉ.
Commentaires
Pour les collègues du premier et du second degré qui travailleront à l'ESPE en temps partagé, il me semble que nous pourrions revendiquer des défalques horaires comparables à celles des enseignants du secondaire qui sont affectés sur plusieurs établissements. Cela coûterait sans doute cher, mais cette situation est imposée par l'employeur, il n'y a pas de raison qu'il n'assume pas les conséquences de ses choix politiques.
Alain Chartier, élu au conseil d'école de l'ESPE (collège C)